CHRONIQUE LITTÉRAIRE

LA FEMME DE QUELQU’UN : ÉPISODE 05

_______ Gérôme ________

J’hésite encore et j’ai du mal à conclure. L’idée de faire venir Jodelle à Yaoundé est une idée que j’ai eue bien avant qu’elle ne me la propose. Mais étant donné que c’est une décision un peu lourde impliquant des conséquences qui m’incombent totalement, j’ignore s’il est judicieux de l’embarquer dans cette aventure hasardeuse. C’est une jeune femme, très belle, pleine d’énergie et surtout très curieuse. Je ne pourrai la contenir et son comportement ne dépendra que d’elle, pourtant j’ai peur d’une chose. Je connais les gars de Yaoundé… Surtout ceux d’Essos ou plus encore Efoulan par là, dès qu’ils ciblent une petite étrangère là ils tombent dessus comme des chacals et j’en connais qui sont des sièges de toutes sortes de maladies…

Ma mère apparaît en ouvrant le rideau, venant de l’extérieur certainement avec les mains pleines de boue.

Maman : Grand, ce n’est pas mieux que tu viennes me trouver à l’extérieur pour qu’on cause pendant que je pèle les maniocs?

Je me lève : C’est une bonne idée.

Nous allons à l’extérieur. Il a plu presque toute la journée donc l’odeur de l’humide est partout, ainsi que la boue rouge sur le manioc qui colle presque. Elle fend une tubercule en deux et se met à éplucher sans le couteau.

Maman : Alors, tu comptes rentrer quand ?

Moi : À priori, je devrais être à Yaoundé à la fin du mois. Mais j’ai quelques choses à gérer avant de décoller.

Maman : D’accord, j’espère aussi que le fait pour toi de traîner ici ne va pas empiéter sur ton travail.

Moi avec ventardise : Noooon… Quand même, c’est moi le deuxième patron non!?

Maman sourit : Ah si tu le dis. Mais si je dis que je ne suis pas fière de toi c’est que c’est un mensonge. Pas comme ces jeunes qui s’en vont ailleurs devenir des escrocs ou se retrouver dans les sectes exotériques.

Moi : Maman, si quelqu’un est sorcier c’est que sincèrement c’est lui même qui a cherché.

Maman : Hum… Je te crois !

Moi : Maman !?

Maman : Oum!?

Moi : Concernant Jodelle, j’avais un souci qui n’arrête pas de me gratter.

Maman : Dis moi.

Moi : Je pensais à l’amener avec moi et je ne sais pas si la décision est bonne.

Ma mère arrête de travailler et prend un temps pour réfléchir en gardant son regard perdu dans le vide. J’attends patiemment le résultat de sa mure réflexion. Enfin elle se détend…

Maman : Gérôme ( elle le dit avec un ton de sagesse)… Tu sais, on dit que la femme est un être capable de construction et bien encore de détruire et aussi personne n’est capable de la changer. Avec ton père je m’étais retrouvé dans la même situation que toi. J’étais enceinte et lui il était orphelin et on était vraiment amoureux, pour moi en restant au village c’était un risque à ne pas prendre donc nous sommes partis pour la ville tous les deux. Nous y avons découvert tellement de compatibilité, mais aussi beaucoup de défauts, il fallait donc s’adapter. Si tu arrives à trouver quelqu’un qui va avec toi, rien à faire vous allez aller loin ensemble. Par contre si tu as la malchance de tomber sur la mauvaise, ton fardeau tu le traînera jusqu’à ta mort.

Moi : Et comment tu trouves Jodelle ?

Maman : Pour être sincère, c’est une fille qui t’aime beaucoup, qui connait la souffrance… Comme toute jeune de son âge elle est très curieuse et espère profiter d’avantage de la vie avant d’avoir notre âge. Jodelle a un enfant certe, mais très bientôt Sophia sera comme sa petite sœur et en plus ce n’est pas elle qui s’en occupe. Donc si tu veux partir avec elle, retire le cœur et essaye plutôt de la contenir de façon tactique, ne sois pas trop possessif, trop jaloux. Mais si tu vis dans la même maison que elle, c’est dangereux. C’est le concubinage qui empêche les mariages ici dehors. Tu l’auras pour toi après le mariage et la dot que tu auras à payer lui donnera un poids assez convainquant, quand vous êtes jeunes, respectez vos libertés. Elle n’a pas de la famille là bas ?

Moi : Je n’en sais trop rien, mais je ne crois pas. Mais elle m’a dit que sa copine avait l’intention d’y vivre bientôt elle aussi.

Maman : Quelle copine ? Michelle ??

Moi : Oui.

Maman : Et comment il va faire avec sa bureautique ? Puisqu’elles vont toutes les deux quitter.

Moi : Il va trouver des gens, j’en suis sûr.

Maman : Ma conclusion est celle-ci. Va chez toi, réfléchis, prends du temps et pèse le pour et le contre, pour l’instant tu es sous l’adrénaline et l’amour vous embrouille mais quand vous aurez des vrais problèmes, tu vas la voir seulement sa tête va t’énerver, vice versa.

Moi : C’est compris. Je vais prendre du temps… Le temps aussi qu’elle se prépare. Mais à un moment donné je vais devoir venir prendre Sophia aussi.

Maman : Comme tu veux, en tout cas c’est ta fille non!?

__________ Jodelle ___________

Depuis qu’elle a appris que son père est sur le point de partir, Sophia ne veut plus parler à qui que ce soit. La pauvre fait la tête, surtout tout pour attirer l’attention et faire passer son message.

Moi : Mamaa… Donc la compote de pommes tu ne manges pas chéri ?

Sophia : Pas faim.

Ma Tante arrive énervée.

Tata : Il faut la laisser comme ça, l’enfant ci aime beaucoup trop les caprices. Si elle veut mourir de faim elle n’a qu’à le faire…

Moi : Tata…

Elle maugrée et s’en va.
J’ai mon sac à main sur l’épaule, puisque je m’apprête pour aller au travail. Je me lève donc…

Moi : Chérie, on va ensemble travailler ? Tu veux ? Là bas tu vas jouer avec Abiba

Sophia hoche la tête en souriant, essuyant les petites larmes stagnantes sous ses yeux.
À peine on se retrouve à l’extérieur, prêtes à s’en aller que Gérôme débarque. Quel soulagement et surtout un ravissement. Sophia lâche brutalement et courre s’écraser dans les bras de son père qui la soulève d’un coup pour la bloqué sur son bras droit.

Gérôme : C’est quoi cette tête Trésor ? Tu as pleuré ? C’est Maman ?

Moi : Depuis que ta fille a apprise que son père s’en allait elle ne veut plus parler aux gens.

Gérôme : Est-ce que je pars maintenant ? Me voici non!? En plus même on va sortir juste tous les deux.

Sophia égaillée : C’est vrai ??

Gérôme : Éh Oui… Et tu vas manger tout ce que tu veux. Tout !! Les bonbons, le yaourt

Sophia : La banane ?

Gérôme en riant : Oui, même la banane… ( Il s’adresse à moi). Tu t’en vas déjà au travail ? Je ne comptais pas te trouver.

Moi : Oui, j’ai un peu traîné parce que je devais aider Tata à presser le manioc pour les bâtons de manioc.

Gérôme : D’où cette odeur bizarre.

Moi : Hum… Comme on t’a dit là, tu vas sentir ça partout maintenant.

Gérôme : Bref, je pars saluer ta tante avant de m’en aller avec Sophia.

Moi : D’accord, le soir alors. Je t’aime.

Gérôme en entrant : Éh pardon !! On aime les riches.

Une quinzaine de minutes plus tard j’arrive au travail, avec sur la tête et le pull un peu de rosé. Michelle y est déjà et travaille sur l’impression d’un étudiant.

Michelle expire : Enfin tu arrives, Dieu merci… S’il te plaît commence à agrafer les doucement en piles là. Il ne faut pas que ton oncle vienne trouver ça ici non fait, sinon il va nous crier sur la tête. Tu le connais non!?

Je m’y mets au moment même. Un jeune homme entre et demande un renseignement, la position des amphi 354 et 350. Je lui indique de façon déconcertée, mais il ainsi en essayant de faire la conversation, malgré ma déclinaison.

Lui : Je n’aimerais pas te perdre beaucoup de temps Jodelle, mais j’aimerais savoir si tu as quelqu’un.

Moi : Je suis en couple et avec le père de mon enfant.

Lui en souriant : Ah, déjà mère. C’est… C’est très admirable. En fait je ne vis pas ici, je suis là pour une mission et je dois remettre certains dossiers à un professeur.

Moi : Grand ! Tu voulais un renseignement non!? Je t’ai donné non!? Tu m’as demandé mon prénom non!? Tu m’as demandé si j’ai un gars non!? Je t’ai dit Oui jusqu’à te dire que j’ai un enfant… De quatre ans même. J’essaye d’être vraiment courtoise parce que je considère que tu es un client, mais sincèrement si je me sens harcelé je vais te demander de sortir.

Il sourit encore : Woow. D’accord, désolé je ne sais pas ce qui m’a vraiment pris. J’espère juste qu’on se reverra un jour. Tu es quelqu’un d’unique.

Je ne réponds pas, il s’en va. Michelle qui nous observait depuis s’approche enfin de moi et le regarde s’éloigner en le regardant avec désir.

Michelle : Non mais quand même, regarde moi ce fessier de dieu.

Moi : Tu ne vas pas recommencer ein!? J’aime ma vie. On connait ce genre de gars de toute façon, ils ne viennent de nulle part et puis disparaissent.

Michelle : Ah.

Moi : Tu pars même quand pour Yaoundé finalement ?

Michelle : Dès que le studio de la de Djess va se libérer, puisque c’est dans l’un de ses studio qu’on va devoir vivre… Mais je crois que d’ici quatre mois tout sera fixé.

Moi : Tu vas me manquer.

Michelle : Toi aussi. Mais pourquoi tu ne viendrais pas avec nous ?

Moi : C’est comme si on a enterré mon cordon ombilical ici. Je vais quitter pour aller où ? Je ne veux pas trop rêver.

À suivre…

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