CHRONIQUE LITTÉRAIRE

LA FEMME DE QUELQU’UN :  épisode 28

En apprenant la mort du père de Anna, la première des choses qui m’est venue en tête a été le fait probable que désormais Gérôme se détourne de moi pour se concentrer elle… Étant donné que c’était déjà le cas bien avant que cela n’arrive.

Il y a quelques heures déjà que le cas de décès a été annoncé, je suis assise sur une marche des escaliers de l’extérieur, Anna elle et sa mère sont à l’intérieur. J’ai eu la tête qui tournait, c’est comme si une fois de plus par cette nouvelle je revoyais mon père mourir, du coup j’ai préféré me retirer et faire mon deuil, question aussi de laisser la mère consoler sa fille.

– Jodelle!?

Je lève lourdement la tête et devant moi se trouve Gérôme, apparemment bouleversé par la nouvelle et aussi stressé du fait qu’il aura à devoir consoler Anna.

Moi : Elle est à l’intérieur.

Je le dis de la façon la plus froide possible, comme pour me débarrasser de lui. Pour qu’il aille faire ce pour quoi il est venu, puisque c’est clair que ce n’est pas pour moi qu’il est là. Gérôme sur le coup hésite un peu à s’en aller, mais juste après il change d’idée et se précipite à l’intérieur. À quoi je m’attendais en tout cas…
Cette-fois c’est de trop, je compatis véritablement à la situation de Anna, mais ce qui me manque c’est la force de les voir se rapprocher autant alors qu’il y a quelques heures je semblais entrevoir un soupçon d’espoir pour le salut de ma relation avec Gérôme. Si finalement ils sont fait l’un que pour l’autre et que je n’étais qu’un canal pour mener à leur rencontre, qui suis-je pour m’y opposer. En ce qui me concerne pour l’instant, Sophia me manque énormément !! Je pleure aussi pour elle, mais je sais qu’elle me demanderait de ne pas le faire si elle était ici… Cette petite a su hériter de la force mentale de son père.

Gérôme arrive au hall : Anna…

Anna quitte les épaules de sa mère et se précipite en sanglots sur Gérôme, comme une masse inerte, elle se jette sur sa poitrine en tirant les pans de son vêtement.

Anna avec amertume : Il est mort!! Il n’avait pas le droit de faire cela… Il n’avait pas le droit de me quitter.

Gérôme : Même s’il l’a fait, il vit à présent en toi et est plus proche Anna… C’est un fait.

Anna : J’avais encore besoin de lui, je n’avais rien appris de lui!! C’est maintenant que je me rends compte à quel point je tenais à lui… Et pourtant il s’en est allé sans achever mon éducation, il m’a tout appris sauf à vivre sans lui.

Gérôme regarde la mère de Anna, Mme Evelyne la pauvre qui se fait passer pour la méchante. Non seulement à présent veuve mais aussi rejetée par sa fille qui est convaincue que c’est elle le moteur de cette tragédie.

Gérôme : Tu as tort Anna… Il te reste ta mère et ça il faut le savoir.

Anna : Laquelle ?? Celle qui a poussé mon père dans la tombe ?? Gérôme je…

Gérôme : Arrête!! Je comprends le fait que tu sois brisé, mais jamais… Jamais en aucun cas tu ne dois penser que ta mère est responsable de tout ceci, parce que tout comme toi elle souffre et elle le fait même encore plus que toi. Tu crois vraiment que de là haut ton père sera heureux de vous voir séparées ??

Anna : Je n’arrive pas à croire… ( En regardant Gérôme ) je n’arrive pas à croire que ce soit vrai. Je n’ai plus de père. C’est donc fini ?? Je suis orpheline !!

Gérôme : Tout comme moi… Et pourtant regarde, j’ai sû survivre jusqu’ici et encore ce n’est pas terminé. Tant qu’il te reste des personnes qui t’aiment, jamais tu ne vas te sentir totalement délaissée… Parce que en chacune de ces personnes se trouvera une part qui comblera le manque que tu ressens.

Tout d’un coup, les deux se tournent et me regardent entrain d’épier secrètement derrière la porte. Cette-fois je m’en vais pour de vrai… Sans rien dire.

En soirée.
Il est 19h je crois, je me vernis les ongles des pieds. C’est ce que j’aime faire quand je stresse ou quand je suis triste. La musique mixte m’aide aussi à laisser aller… J’y repense, les idées n’arrêtent d’abonder dans ma tête. Pour faire court, je décide d’appeler la mère de Gérôme pour qu’elle me passe mon petit ange. Il vient tout juste de commencer à pleuvoir des cordes, tout d’un coup comme ça.

Le téléphone sonne… Ça sonne encore. Et quand je veux me décourager, quelqu’un décroche.

Moi : Allô Maman…

La voix au téléphone : Allô ??

J’ouvre grand les yeux, ce n’est pas la voix de la mère de Gérôme mais plutôt celle de Sophia.

Moi : Nouu ?? C’est toi ??

Sophia : Grand-mère n’est pas là, c’est qui pardon ?

Moi : C’est mama !! Tu ne reconnais pas ma voix ??

Elle ne dit plus rien au téléphone un moment, je m’inquiète un peu… Mais après son cri subit je comprends qu’elle prenait l’élan pour s’émerveiller.

Sophia : Maaamaa!!!

Moi en souriant : Oui mon cœur. Dis donc toi… Qui t’a appris à décrocher le téléphone.

Sophia : J’ai appris toute seule.

Comme elle est intelligente. Ça elle le tient de moi… Avec la distance j’avais presque oublié son côté vivace et sa vaillance. Sans me laisser demander où est sa grand-mère, Sophia se met à me raconter ses aventures à l’école, au quartier, comment tel petit garçon et telle petite fille sont amoureux, comment à l’école elle répond aux questions. Elle parle beaucoup, je ne l’interrompt pas, au contraire je l’écoute très attentivement avec beaucoup d’émotions… Quelques fois j’essuie les larmes qui perlent sous mes yeux et je lui pose des questions. Son énergie et sa bonne humeur me contaminent et me font comprendre qu’au fond il n’y a que elle qui compte et que jamais je ne ferai en sorte qu’elle pense qu’une autre personne soit mieux que moi. Je comprends la douleur que peut ressentir Mme Evelyne en ce moment… Ta fille doit être ta copine, ta confidente et non ton ennemie.

Sophia tout à coup : Tu viens à Dschang quand mama ?? Tu me manques ein!? Humm

Moi : Très bientôt mon cœur. Toi aussi tu me manques.

Si je pouvais, je viendrais même aujourd’hui… Seulement pour la voir. Je vais vraiment le faire très bientôt.

Sophia : Papa a appelé avant-hier, je lui ai montré ma robe pour la fête de l’école et il a envoyé l’argent à grand mère pour me faroter.

Moi : Il est très gentil ton père.

La mère de Gérôme arrive et je l’écoute « Sophia tu es au téléphone avec qui comme ça ? L’enfant ci a déjà certainement fini mes miettes de crédit dans mon téléphone ».

Sophia : Je suis au téléphone avec Mama…

Moi : Allô Maman… Non, c’est moi qui ai appelé ne t’inquiètes pas.

La mère de Gérôme : Ahn c’est toi ( elle rit) je comprends pourquoi elle est aussi agitée. Depuis que l’enfant ci sait manipuler le téléphone, mon crédit souffre entre ses mains… Un peu un peu « grand mère je veux appeler la mère de ma copine Leslie ».

Je ris : Ça c’est Sophia… Du courage seulement.

_ Alors comment tu vas ma princesse ? Le boulot ça marche ? J’ai appelé Gérôme l’autre jour il m’a dit que ça n’allait pas beaucoup entre vous… J’espère que tout s’est arrangé.

Moi : Oui Maman, t’inquiètes je vais bien. Enfin tout semble aller pour le mieux pour l’instant… On ne se plaint pas.

_ Dieu merci.

Après plus d’une heure au portable, nous nous séparons enfin. La pluie à l’extérieur n’a pas toujours cessée donc probablement Jess et Michèle ne vont pas rentrer aujourd’hui, avec souvent leur programme à part.

Il est 22h par là quand j’écoute quelqu’un frapper à la porte. Je suis en caleçon et j’ai un paquet de chips en main devant la télé entrain de visionner.

Moi : C’est qui??

_ C’est moi Jodelle…

Surprise !! Quand je reconnais la voix de Gérôme. Je m’embrouille presque en confondant télécommande et paquet de chips. Je file dans la chambre pour prendre un pagne…

Moi : Une seconde !!!

Je m’en vais prendre le pagne que je noue autour de mes reins avant de venir ouvrir la porte. C’est bien lui, c’est mon Gérôme tout entier !! C’est comme si pour une nouvelle fois je le revoyais… Il est tout mouillé et tremblote comme une feuille. Ses dents serrées à cause du froid font ressortir ses mandibules musclées.

Moi : Tu… Tu es tout mouillé.

Gérôme sourit : normal, j’étais sous la pluie petit modèle.

Ce petit nom encore qui me refait l’effet de la première fois. Il n’arrête pas de me regarder et moi ça me déconcentre… Il est grand, vraiment grand.

Gérôme : Tu pleurais?

Moi : Non, enfin… Pas vraiment. J’étais au téléphone avec Sophia et ta mère.

Gérôme : D’accord, je peux entrer alors ??

Moi : Eeeu Oui !! Oui bien-sûr. Mais tu es mouillé, comment tu vas faire avec tes vêtements ?

Gérôme : Jess et Michèle ne sont pas là ? C’est calme ici.

Moi : Michèle m’a envoyé un message pour me dire qu’ils seront pas là ce soir.

Gérôme entre et ferme la porte derrière lui, il retire son t-shirt mouillé et le laisse par terre. Mes yeux ne se détournent pas de son torse… Sans me demander il retire le pagne sur mes reins pour se couvrir avec, par réflexe je me cache. Il se moque de moi.

Moi : Je crois que…

Gérôme : Jodelle il faut qu’on parle…

Je hoche la tête : Oui. Je le pense aussi…

À suivre…

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