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COUPE DU MONDE – QATAR 2022 : reportage à Doha sur la vie des supporters en dehors des stades

Le football rythme la capitale qatarienne, réveillée par le monde entier. En dehors du ballon, les organisateurs multiplient les propositions pour changer l’image du Qatar, si discret et tranquille.

Le Souq Wakif n’a jamais aussi bien porté son nom, un joyeux bazar coloré et débridé. On y croise un Brésilien avec le maillot de Neymar sur un chameau, un groupe de Marocains en trans derrière une enceinte. Depuis le coup d’envoi de la Coupe du monde, ce quartier traditionnel de Doha rassemble la planète au milieu de saveurs épicées et d’échoppes de souvenirs. Dans une ville cultivant le gigantisme, ces ruelles étroites et pavées sont devenues un passage incontournable, un lieu de brassage des supporters. Le Mondial a complètement changé la vie d’ici, ​assure Abdeslam, un Marocain installé depuis cinq ans. « Après, la routine reprendra, sans le bruit et la fête.»

« Je suis venu pour le foot »

Construit en cinquante ans et au milieu du désert, le Qatar n’a jamais accordé une place de premier plan au tourisme, effrayé par le devenir du voisin émirati et freiné par le blocus de 2017. Il constitue toutefois le pilier de la stratégie de diversification de l’économie et les autorités ont débloqué d’importants moyens pour développer ce secteur, dont la Coupe du monde offre un test grandeur nature. « Il n’y a pas 40 milliards de choses à faire »,​résume Ronan, un commerçant ligérien, de retour à Doha quinze ans après son premier séjour.

Parmi le million et demi de supporters accueillis pendant la compétition, les matches demeurent la pierre angulaire de la journée. «J’aime le foot et je suis venu pour ça », ​assure Yonjun. Ce supporter coréen a prévu de vivre neuf rencontres dans les stades en autant de journées. « Avec les déplacements, le match et le retour, ça prend l’essentiel du temps. Après, je suis trop fatigué.» ​Et quand il ne pousse pas la grille d’une enceinte, il retrouve ses amis autour d’une bière et devant la télé, dans les bars bruyants des hôtels internationaux, nichés dans les gratte-ciel.

Ioan a tenté de varier les plaisirs, en s’offrant une respiration au musée islamique. Il veut devenir avocat, donc il passe deux à trois jours à étudier », excuse Jeremy, son père. Ces Gallois l’avouent : sans la participation historique du Pays de Galles, 64 ans après, ils n’auraient sans doute jamais effectué le voyage. « On n’était pas très à l’aise avec la question des droits humains», ​développe Jeremy. « L’intérêt, c’est de retrouver toutes les nations dans un même lieu ».

« C’est aussi un voyage »

Une virée dans le désert, un bain de foule dans la fan zone d’Al Bidda ou une promenade sur la Corniche : dans un pays traversé par des autoroutes, au sol aride, la vie hors les murs se fait rare. « On a fait quand même un peu de shopping pour la famille. Finalement, c’est passé vite », ​assure Clarisse, une Franco-Allemande. La Coupe du monde a aussi réveillé Doha. À l’entrée de Lusail, la nouvelle ville encore en chantier, un parc d’attractions a vu le jour à deux jours du coup d’envoi. Avant les manèges, des conteneurs baroques et des caravanes bariolées proposent des cuisines du monde entier.

À l’entrée de West Bay, dans le quartier des ambassades, les organisateurs ont tout juste aménagé des plages encore méconnues. Surtout, ils ont densifié les propositions de sorties, en dehors du foot. À la nuit tombée, sur les canaux de la marina de Pearl, des spectacles poétiques et de lumière rassemblent les foules. Au golf, sous des araignées géantes, un festival diffuse des sons électroniques. « Si on cherche, on trouve des choses à faire », ​assure Laurent.

L’appareil photo de ce supporter français contient déjà 2 700 photos. D’une vue au 61e étage de la tour Kempiski, du village de Katara, des musées ou d’un marché artisanal. « C’est aussi un voyage, ​poursuit-il. Le foot rassemble, le boycott divise. » Ronan, lui, bénéficie de la présence au pays de son frère pour se laisser guider hors des sentiers battus, vers les plages sauvages du nord, un bout d’ailleurs fouetté par le vent. « On a beaucoup bougé, j’ai même fait du kite surf ». ​Sous 30° au cœur de l’automne. « Ça m’a donné envie de revenir avec mon épouse », sourit Laurent. Un autre défi pour le Qatar : vivre au-delà du Mondial.

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