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LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE : le Cameroun au bord d’une crise sans précédent

[abelainfo] - Dans un communiqué rendu public le 24 mars dernier, jour de la célébration de la journée mondiale de la tuberculose, Positive-Generation a lancé un appel aux autorités camerounaises sur de nombreuses dérives constatées dans la prise en charge des patients tuberculeux au Cameroun, au mépris des droits à la santé.

L’organisme Positive-Generation, dans son communiqué fait savoir que les patients tuberculeux ont subi 24 semaines cumulées de rupture de médicaments en une année selon le rapport annuel du Treatment Access Watch (TAW) de 2023. Il s’agit en général des REHZ représentant 78 % des ruptures et les RH, 22 %.

Sur 101 formations sanitaires observées, les résultats annuels issus du terrain montrent un total de rupture de 24 % des antituberculeux, 4 % pour les tests de crachat, 11,8 % pour le traitement préventif et 5,68 % pour le vaccin BCG. Le même rapport présente une rupture de 61,5 % des REHZ entre avril et juin 2023, trimestre qui a connu le plus grand nombre de ruptures.

« Au courant de la semaine du 11 au 15 mars 2024, l’organisme a reçu le signalement d’une maman en détresse face à sa fille dans un état critique parce que dans l’incapacité d’effectuer depuis cinq jours des examens de TB-LAMP et de GenXpert après suspicion d’une tuberculose pulmonaire chez l’adolescente. Pas l’ombre de réactifs de ces deux examens essentiels dans la ville de Douala. Les efforts du personnel médical à la recherche d’une solution alternative sont restés vains. Même le Groupe Technique Régional (GTR)-tuberculose qui a été contacté n’a pas pu donner réponse favorable. Lui-même incapable de résoudre cette situation d’une extrême gravité, encore moins de déterminer les dates des prochains ravitaillements dans les Centres de Diagnostic et de Traitement (CDT) de la région du Littoral », peut-on lire dans la note.

Au regard de tous ces faits macabres, Positive-Generation a saisi l’occasion offerte par la célébration de la journée mondiale de la lutte contre la tuberculose le 24 mars 2024 pour non seulement présenter cette situation alarmante, mais aussi poser un diagnostic froid.

L’incompétence du PNLT

Selon l’organisme, « le Programme National de Lutte Contre la tuberculose (PNLT) n’arrive pas à répondre aux attentes de la population. Il est incapable d’assumer le minimum qui s’impose, à savoir, rendre disponible les traitements contre la tuberculose dans les hôpitaux, conformément aux directives nationales de l’Etat du Cameroun. À cela, s’ajoute le vol l’année dernière des antituberculeux à la Centrale Nationale Approvisionnement en Médicaments et Consommables Médicaux Essentiels (CENAME) pour près d’un milliard de FCFA ».

À Douala, Anne sous traitement dans une formation sanitaire a été obligée de se procurer le médicament en pharmacie au coût de 40 000 FCFA, du fait du manque des médicaments antituberculeux dans les formations sanitaires. « Pour les patients qui disposent de moyens financiers, nous leur prescrivons du RIFATER et Dexambutol qui coûtent environ 40 000 FCFA pour un traitement de deux semaines pour ceux qui prennent 5Cp/jr », confie un médecin traitant aux observateurs de P.G. sur le terrain.

Non-respect des directives

Cette situation est en déphasage avec décision N°D31-26/L/MSP/CNLT/GTC-TB/SP du ministre de la Santé publique qui stipule que la fourniture des médicaments essentiels antituberculeux du PNLT aux malades est gratuite depuis 1er octobre 2004. Une décision, complétée par celle N°468/MSP/CAB du 24 septembre 2004 en son article 5 alinéa 1 qui dit que : « Le recouvrement des coûts sur la tuberculose est supprimé » et l’article 2, précise que : « Les médicaments antituberculeux pour tous les malades infectés ou non par le VIH sont gratuits pendant toute la durée du traitement ». La situation est d’autant plus critique parce que, pendant que les médicaments se font rares dans les formations sanitaires, ils sont disponibles au marché Central de Douala dans un espace connu sous le nom de « Gazon », où les médicaments de la rue sont commercialisés.

« Ces ruptures à répétition interviennent au moment où l’Etat du Cameroun à travers son plan stratégique national 2020-2024 avec extension jusqu’en 2026 entend réduire l’incidence et les décès de 30 % par rapport à 2021 et aussi réduire à moins 10 % la proportion des familles qui supportent des coûts catastrophiques dus à la TB », renseigne la circulaire de P.G.

Au regard de ce qui précède, l’organisme affirme que ces manquements traduisent des cas de violation grave des Droits à la santé via l’article 25 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (DUDH), et de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC).

Les mesures

Selon P.G., si des mesures urgentes ne sont pas prises pour résoudre ces problèmes d’une extrême gravité, la vie du patient sera toujours en danger. D’où l’invite au Chef du gouvernement à tenir des engagements du Cameroun en ce qui concerne la politique de gratuité dans la prise en charge de la tuberculose adoptée en octobre 2004 ; du gouvernement à prendre des mesures conformes aux engagements internationaux en vue d’une protection des populations dans le respect des droits fondamentaux qui sont violés de marnière permanente ; au programme National de Lutte contre la Tuberculose à prendre des mesures nécessaires pour une meilleure distribution des médicaments et intrants tuberculeux afin d’éviter les ruptures ; du programme National de Lutte contre la Tuberculose à veiller à la mise en œuvre efficiente et efficace de la stratégie de lutte contre la tuberculose de l’OMS et appliquée par l’Etat du Cameroun qui consiste à mettre fin à ce fléau d’ici 2030 ; et enfin au CCM de mener une enquête approfondie afin de trouver des solutions pérennes à cette situation.

Raphael Mforlem

La Une du journal LA VOIX DES ENTREPRISES parution du mardi 26 mars 2024.
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